ROUDOUALLEC....
la petite histoire des "bail-kik"....
On pouvait la "fumer" dans les cheminées... Par exemple, on suspendait des andouilles à hauteur de 1m50 environ au-dessus des flammes dans les cheminées; et lorsqu'il se produisait de la dense fumée, alors la peau ou la paroi extérieure de la pièce de "viande" se noircissait, se noircissait.... jusqu'au moment où les maîtres des lieux estimaient que cela avait assez duré, et que l'on pouvait sans doute commencer à savourer la belle andouille!.... L'andouille ainsi fumée était bien plus que bonne!!!! Cette pratique est toujours en usage chez certains habitants de Roudouallec, et ailleurs aussi.
Et puis, parallèlement à cette façon de faire, existait le fameux "bail-kik", le saloir, le charnier....
Au début étaient les bail-kik carrément creusés DANS la pierre, selon le même principe que les auges pour les animaux dans le temps. Ils avaient un diamètre d'environ 50 centimètres pour une hauteur avoisinant 1 mètre. Ce qui donnait un poids proche des 350 kilogrammes. Oui, c'était un peu lourd à "gérer"...
Alors, on se mit à fabriquer des bail-kik en bois, par exemple dans des demi-barriques de cidre (ou des barriques entières, selon la quantité de viande à conserver), mais vierges de cidre bien sûr, et sans fuites entre les planches arquées, lesquelles étaient maintenues serrées les unes contre les autres par des sortes de fines planchettes de bois flexibles; puis aussi, le progrès aidant, par des cerclages en métal.
Il s'agissait alors de bien surveiller tout ça, car si l'on s'apercevait que ces cercles en métal "rouillaient", s'oxydaient un peu à cause de l'exfiltration du sel, alors il convenait de les remplacer le plus vite possible, avant que tout le contenu de la barrique ou de la demi-barrique ne soit contaminé irrémédiablement.
Il était nécessaire de recouvrir le bail-kik par un couvercle adéquat, évocant une sorte de grosse cuvette en terre cuite ou en grès, l'un des côtés (fonds) ronds de la barrique, par exemple; sans oublier de poser une lourde pierre dessus pour qu'il soit bien clos, bien calé. Cela étant fait, on plaçait délicatement le bail-kik dans un coin sombre de la maison ou de la grange, à l'abri des éventuels voleurs de toutes sortes, en tous cas!....
Plus pratiques étaient les bail-kik en grès, car plus malléables et plus faciles à nettoyer; de même, par ce moyen, on pouvait beaucoup plus aisément fabriquer des bail-kik de différentes tailles.
Il fallait avoir du gros sel en assez grande quantité, beaucoup de gros sel que l'on achetait par sacs dans les épiceries et les alimentations générales du coin.... Par exemple, la famille d'Anna, à Laz, achetait son sel chez Perrichou, près de l'église.
Au fond du bail-kik, on étalait une bonne couche de gros sel. Puis on plaçait les morceaux de lard cru en rond, bien calés les uns contre les autres. Certaines personnes ajoutaient une gousse d'ail auprès de chaque morceau de viande pour "donner du goût". On mettait aussi du salpêtre, pour que la chair soit bien rose. Sans oublier le poivre, bien sûr.... Et on remettait une couche de gros sel.... Puis une autre couche de morceaux de viande.... Et ainsi de suite jusqu'à épuisement du stock de viande.
Un peu avant le fond du bail-kik, on plaçait le morceau de la queue du cochon, pour se rappeler qu'on n'était pas loin de la fin de la réserve, et qu'il était temps de tenir "prêt" un nouveau cochon dans la porcherie, de songer à tuer bientôt ce nouveau cochon. Le morceau de la queue du porc n'était pas considéré comme un "bon" morceau.
Il fallait attendre un mois, en moyenne, entre le moment de la mise de la viande dans le bail-kik et le moment de cuisiner cette viande. Plus on laissait la viande à l'intérieur, plus elle était salée évidemment et plus il fallait se débrouiller ensuite pour la "dessaler".... Il était fréquent que se produise le phénomène de la "saturation": pas suffisamment tassés, les morceaux de viande se soulevaient et se trouvaient ainsi hors de la saumure, et se mettaient alors à jaunir. Et on entendait les gens dire et se dire que leur lard était jaune!!!! et qu'il n'avait pas un bon goût!!!
"ba 'n ti Jop, al lart zo melenn...."
En ce qui conserne la cuisson d'une viande ainsi conservée, rien de plus simple: on passait le morceau de porc sous de l'eau fraîche pour le dessaler quelque peu et le nettoyer, et chaque cuisinière le mitonnait à sa façon....
les riches heures des barattes....
Nous nous faisons ici un devoir et une joie réelle de vous les présenter , de les "partager" avec vous. Dans la suite logique du récent article consacré à l'écrèmeuse, nous présentons cette fois la baratte, ou, en Breton: ar ribot.
La baratte était un instrument qui permettait de transformer la crème du lait en beurre. Il s'agissait, en faisant "tourner la mécanique", de séparer les particules de matière grasse contenues dans la crème, du lactosérum, dit petit lait, dit lait de beurre, dit encore babeurre....
Toujours d'après notre voisine, lors du barattage, les particules de matière grasse contenues dans la crème s'agglomèrent entre elles et constituent des grains de beurre. On les extrait alors de la baratte, on les lave puis on les malaxe pour ainsi débarrasser le "beurre" d'un maximum de babeurre, ou petit lait...
Notre chère Anna se rappelait que c'était Maurice Poupon, de Leuhan, qui venait "poser" les nouvelles écrèmeuses et autres barattes et réparer celles qui en avaient besoin.... Mais que c'est loin, tout ça!
Chez Anna, comme dans bien d'autres familles, on ne laissait pas couler de l'écrèmeuse la crème fraîche dans un pot contenant déjà de la crème "froide"! Cette dernière était vidée dans un pot en grès, plus grand. La nouvelle crème devait refroidir un moment avant d'être à son tour versée dans le pot en grès.
-"La crème fraîche était difficile à baratter!!" nous avait précisé Anna.
Avant de la baratter, on devait attendre quelques jours. Anna disait encore:
-"Chez nous, on mettait les pots en grès de crème au bain-Marie froid, dehors, pendant toute la nuit. Ou on la mettait aussi souvent dans l'eau du puits!!! En tous cas, on attendait quelques jours avant de baratter la crème fraîche".
Attention!!! avait précisé notre chère Anna: "le marb'l lez et le garde-manger, ce n'était pas la même chose! Je me rappelle bien, disait encore Anna, que quand on était en pension à Chateauneuf, on avait chacune un garde-manger au réfectoire!!"
Bon! Revenons un peu à la baratte....
- les parents de notre ancienne fermière vendaient une partie de leur beurre deux fois par semaine, à Bec-Ar-Menez, au carrefour de la route dite de Leuhan et de celle menant de Roudouallec à Chateauneuf-du-Faou et Laz. Un marchand passait à cet endroit régulièrement, près de la maison de la famille Salaün, et achetait leur beurre aux paysans.
- le beurre fabriqué par les parents d'Anna était particulièrement bon car, outre le prix "normal" versé en argent liquide pour le beurre, ledit marchand leur donnait toujours un peu plus de "sous", en cachette des autres.... car, répétons-le, ce beurre était particulièrement savoureux.
- lors de la marche à pied, de leur petite ferme jusqu'au lieu de vente à Bec-Ar-Menez, le beurre se trouvait dans de larges jattes qui étaient placées au fond de grandes sacoches noires toujours "mod-kozh".... Le beurre était vendu doux; les acheteurs, dans les épiceries des communes, après, le salaient à leur gré. Parfois, un peu de lait "giclait" de la motte de beurre.... et cela montrait bien que les boulettes de beurre n'avaient pas été sorties de la baratte comme il aurait fallu!!....Quelques années plus tard, un marchand passait en camionnette dans les fermes ramasser les beurres à vendre.... toujours payés en liquide, car les chèques n'étaient pas encore popularisés, à vrai dire.
- Tout le beurre fabriqué n'était pas vendu! On en gardait pour la maison, bien sûr. "Et je vais même te dire quelque chose!" nous avait alors murmuré Anna: "on mettait la plus belle crème de côté pour nous, pour la famille, ce qui nous permettait de fabriquer du beurre extra, rien que pour nous! Et ce bon beurre, on le mettait sur nos crêpes et sur notre pain; on s'en servait aussi pour faire la cuisine."
- Quand on avait sorti toutes les petites boules de beurre de la baratte, il restait le "lez-ribot", le lait-ribot comme on dit maintenant. On ne le jetait pas car on mangeait des pommes de terre chaudes avec du lez-ribot, et on le buvait en mangeant des crêpes aussi.
- "Parfois, ma mère nous faisait du "lez-gwell'd", c'est-à-dire du lait caillé. Mais je ne sais plus trop ce qu'elle mettait dedans pour le faire cailler!"
- " Je me rappelle aussi qu'on mangeait souvent de la soupe vermicelle faite avec du lait! Ma soeur et moi, on aimait bien ça!"
- "Parfois, un menuisier qui habitait Croas-An-Teurec, un petit peu plus bas que la maison où les boches avaient tué toute la famille Herviou, venait réparer la baratte chez nous, quand elle coïnçait un peu.... C'était un cousin à ton père, il s'appelait Charles Bleuzen; c'était un célibataire. Son père, c'était Jop! Et sa mère, on l'appelait Chann Jop, ou encore Chann guern-Ar-Pipet".
Tout ce qui est écrit ici, est VRAI, AUTHENTIQUE. La VERITE n'a pas été travestie. JAMAIS.
au bon temps des écrèmeuses....
Les parents d'Anna, vers la fin des années 20 et surtout dans les années 30 où elle était gamine dans une ferme de la région Laz - Leuhan, possédaient alors un troupeau composé d'une douzaine de vaches. Ces charmantes bêtes à cornes étaient élevées principalement pour la production de lait, puis pour la production de petits veaux (viande, renouvellement du cheptel, croisements).
Concernant le lait, Anna se rappelait fort bien de ce qui se passait. Les vaches étaient traites à la main deux fois par jour: le matin et le soir. Et surtout, tout le lait était également écrèmé deux fois par jour. Ce qui sous-entend qu'il fallait laver l'écrèmeuse deux fois par jour aussi! La "grande lessive" de l'écrèmeuse se passait le matin: on "écrèmait" un seau d'eau en guise de nettoyage, par exemple.
Chez le père et la mère d'Anna, on ne vendait jamais le lait entier (non écrèmé) car il servait de nourriture à la famille; et bien sûr à la production de crème en vue de fabriquer du beurre.
C'était ainsi que notre chère Anna n'avait jamais oublié le "lait de poule" que sa maman lui faisait chaque jour après son retour de l'école: un jaune d'oeuf dilué avec du lait froid, puis légèrement sucré.... Parfois, on remplaçait le lait froid par du lait légèrement tiédi (pas chaud, sinon le jaune d'oeuf commençait alors à cuire et à perdre de sa saveur!) Sa maman lui faisait aussi de la soupe aux vermicelles et au lait.
Le lait une fois écrèmé n'était bien sûr pas jeté; on le donnait aux autres animaux de la ferme, de la toute petite ferme! Mais malheureusement, tout le monde n'avait pas forcément une écrèmeuse à la maison: ou bien ils étaient pauvres, ou bien ils ne possédaient qu'une ou deux vaches.
Alors, "écrèmer le lait", pour eux, consistait à râcler, à l'aide d'une simple louche, la crème qui remontait lentement après plusieurs heures, ou la nuit entière, à la surface du récipient contenant leur lait entier, à le déposer dans un autre récipient qui était ensuite versé dans une baratte pour faire le beurre avec cette crème ainsi râclée.
Dans une écrèmeuse, la séparation de la crème et du lait se fait par "centrifugation" comme aimait à nous le rappeler notre chère Anna. L'écrèmeuse centrifuge, comme celles que l'on voit parfois au cours des expositions de vieux métiers et vieux instruments, a été inventée vers l'année 1878 à peu près, selon les connaissances d'Anna.
Le principe de l'écrèmage est celui-ci:
1) dans l'écrèmeuse, on fait couler le lait à grande vitesse (dans les 12 000 tours par minute, nous avait bien précisé Anna!) sur un empilement d'assiettes inclinées. Oui!! Il faut que ça tourne très vite!!
2) sous l'action de la force centrifuge (du "centre" vers l'"extérieur"...), les globules gras se rassemblent vers le centre du tourbillon et donne ainsi....la crème.
3) Quant aux "éléments" non gras, ils sont projetés vers les parois extérieures; c'est le lait dit écrèmé
la noce de marie à la fin du Front Populaire....
.... et de Roger en 1938, aujourd'hui tous deux disparus, reposant au cimetière de Roudouallec, de même que l'une de leurs deux enfants: Colette.
Il s'agit de Marie Hémery, dite Marie "Midi", et de Roger Crevoisier, dit "Saint-Cloud". La noce avait lieu chez mes parents, dans notre salle de danse derrière le bistrot. D'ailleurs, on peut distinguer une partie d'une plaque publicitaire en haut à gauche de la photo, sur la façade de notre maison, comportant le prénom et le nom de Papa: Joseph Bleuzen.
Sur cette photo, plus "récente" que celle de l'école mixte en 1907, quoi qu'ancienne tout de même, on peut reconnaître davantage de personnes. Au moins deux dames sont ACTUELLEMENT TOUJOURS EN VIE: Marie-Jeanne Le Roux-Le Ster, Maman de Paul et de Cathy Cozic; et Mimi Gestin-Rospars. Par ailleurs, on reconnaît fort bien Françoise Hervet-Lijour, Marie Péron-Caurant et sa mère à côté, Jean Le Febvre dit Jean Fèoh, Hélène Daoudal en fille d'honneur, puis ROGER et MARIE; un monsieur que l'on n'a pas reconnu et Yun'n (Yves) Daoudal, unijambiste depuis la guerre 14/18, père de Hélène et Anna Daoudal.
Derrière Soaze Hervet, se trouvent Nana Tallédec, qui fut coiffeuse; Louise Le Bec dite Louise Bég, lavandière; Perrine Crenn et Pierre Crenn, parents de Claudine; Marie-Amice Josse, lavandière, qui habitait un petit peu plus bas que chez nous; Félicie Allain, crêpière; après, mystères.. puis, Marie-Jeanne Le Roux-Cozic (Le Ster, plus tard). À l'accordéon, on reconnait Alain Salaün. Puis viennent Mimi Gestin et Soaïk Jaffré dit Soaïk Torr.
Voilà où nous en sommes. Ce n'est déjà pas si mal. Bien entendu, si vous reconnaissez des personnes, ce serait très gentil de votre part de le signaler ici. Merci bien par avance. Comme nous disons MERCI aussi à la dame qui nous a remis cette photo de noce, qui est la même dame qui nous a donné la photo d'école de 1907.